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Dette publique et microfinance au Maroc : Quand les pauvres financent les riches

9 décembre par Jawad Moustakbal

Jawad Moustakbal (ATTAC CADTM Maroc) était l’un·e des délégué·es du CADTM présent·es lors de la 9e réunion du CADTM Asie du Sud, à Colombo, Sri Lanka (du 2 au 4 décembre 2022). Il a présenté les dégâts causés par le microcrédit et l’endettement public au Maroc depuis des décennies.

Les personnes endettées se sont retrouvées confrontées – notamment par l’accumulation de microcrédits pour rembourser les précédents – à des taux d’intérêt dépassant les 40%

Jawad Moustakbal a entamé son intervention sur la dette privée en détaillant le cas du Maroc. Il a d’abord rappelé que la dette a été utilisée comme outil pour coloniser le Maroc. Après l’indépendance du pays en 1956, la dette a été utilisée comme prétexte pour appliquer des politiques néolibérales. Aujourd’hui, la dette du Maroc a doublé par rapport à son montant de 2012 et le service de la dette représente 10 fois le budget de la santé, 3 fois le budget de l’éducation et 7 fois les montants dédiés à l’investissement public.

Jawad Moustakbal a expliqué que la solution trouvée par le capitalisme pour répondre aux dégâts de ses politiques d’austérité fut le microcrédit. Face au retrait de l’État, qui ne prend plus en charge les besoins essentiels de la population, les classes populaires ont été invitées à contracter des prêts.

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Au Maroc, le système de microcrédit s’est développé au milieu des années 1990. Ce secteur a explosé entre 2003 et 2007, période durant laquelle les prêts se sont multipliés. L’ensemble des crédits accordés par les institutions de microfinance ont été multipliés par 11 entre 2003 et 2007. Entre ces deux mêmes dates, le nombre de débiteur·icess a été multiplié par 4.

Le secteur du microcrédit est ensuite entré en crise en 2008, avec des défauts de paiements à répétition. Les personnes endettées se sont retrouvées confrontées – notamment par l’accumulation de microcrédits pour rembourser les précédents – à des taux d’intérêt dépassant les 40% (pour la moitié des crédits accordés par la microfinance au Maroc). Or, les organismes de microcrédits cachent et noient ces informations dans les contrats qu’ils font signer.

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Trois ans plus tard, en 2011, un mouvement social massif s’est élevé contre les abus de la microfinance à Ouarzazate (Maroc).

Concernant l’utilisation des fonds prêtés par les institutions de microfinance au Maroc, une étude a montré que 43% des fonds sont utilisés pour les consommations quotidiennes, pas pour financer des projets de long terme.

Document PDF : ICI

Jawad Moustakbal est le coordinateur national au Maroc pour l’International Honors Programme : « Climate Change : The Politics of Food, Water, and Energy » à la School of International Training (SIT) dans le Vermont, aux États-Unis. Il a travaillé en tant que chef de projet pour plusieurs entreprises, dont l’OCP, l’entreprise publique marocaine de phosphates. Jawad est également un militant de la justice sociale et climatique, il est membre du secrétariat national d’ATTAC/CADTM Maroc, et membre du secrétariat partagé du Comité international pour l’abolition des dettes illégitimes. Il est titulaire d’un diplôme d’ingénieur civil de l’EHTP de Casablanca.

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