الديونالنساء

5 questions/5 réponses sur la lutte contre les micro-crédits au Maroc

5 questions/5 réponses sur la lutte contre les micro-crédits au Maroc

Majdouline Benkhraba, ATTAC Maroc[1]

Sous forme de questions/réponses, ce texte apporte plus des précisions sur la lutte des victimes des micro-crédits à Ouarzazate, au Maroc qui disent « Non à la dictature de la micro-finance ! »   

  1. 1.      Pourquoi ce mouvement de lutte a-t-il émergé ?

Le mouvement des femmes victimes des Micro-crédits au Maroc, lancé en 2011, est la réponse de plus de 1200 femmes de la région d’Ouarzazate, dans le sud-est marocain, qui sont tombées dans le piège des Institutions de micro-finance (IMC). Ce mouvement a révélé le vrai visage de ces institutions qui se sont détournées de leur objectif principal affiché : aider à la création de projets générateurs de revenus pour les personnes dans le besoin. Grâce à la lutte des ces femmes et de ces hommes, on sait désormais que les IMC, ont d’autres objectifs : réaliser du profit, rembourser leurs créanciers internationaux et offrir une vitrine du soit disant succès de la micro-finance au Maroc

  1. 2.     Qui est ce mouvement ?

Majoritairement composé de femmes analphabètes, maitrisant que le dialecte local, ce qui facilite aux agents des IMC de les convaincre à emprunter et signer des documents et des contrats incompréhensibles pour ces dernières. Ces agents, poussés par leurs directions, à réaliser le maximum de CA. Ce qui équivaut à un maximum de victimes à arnaquer. 

Théoriquement, un micro-crédit est accordé sur la base d’un projet générateur de revenus, sauf que dans la grande majorité des cas que nous avons pu rencontrer dans cette région, les micro-crédits sont octroyés sans suivi réel, ni vérification même de l’existence de ces projets.

Avant que les IMC ne se lancent à la chasse des clients dans ces régions enclavées, ces femmes pauvres, très pauvres arrivaient tant bien que mal à subsister à leurs besoins grâce à leur mode de vie rural fait d’agriculture vivrière, d’élevage et de tissage. Mais malheureusement, ces institutions sous le prétexte de développer ces régions sont en train modifier complètement le mode de vie de ces populations et de ses relations sociales. Ce qui est un drame en soi.

En revanche, ces micro-crédits les enfoncent encore plus dans la pauvreté et les font rentrer dans une spirale infernale de surendettement et d’emprunts croisés. Les poussent dans certains cas à la mendicité, à la prostitution, à des tentatives de suicides.  

Nous sommes dans une région du Maroc, tellement sinistrée, sans infrastructures et services publics que les micro-crédits servent désormais à pallier l’absence de ces services de base. Ces micro-crédits servent aujourd’hui pour financer les soins de santé et l’accès aux services publics en général.

  1. 3.     Quelles sont ses actions et revendications ?  

Trois ans après le début de cette lutte, ce mouvement revendique l’annulation sans condition de ces dettes et l’arrêt de toutes les poursuites judiciaires contre les victimes qui refusent de rembourser. Ce mouvement revendique également de lancer un plan de développement de la région qui permettra de créer des services publics et des emplois aux jeunes.

  1. 4.     Quels sont les perspectives actuelles de la lutte contre le microcrédit au Maroc?

Ce mouvement fait face depuis 2012 à une tentative de criminalisation à travers un feuilleton judiciaire interminable. Les deux coordinateurs, qui sont eux-mêmes victimes, de cette lutte ont été condamnés en Appel pour une année de prison ferme et une amende de 1000 euros chacun. Malgré que ce procès soit entaché de plusieurs irrégularités, la Justice des riches persistent à faire taire la voix de ce mouvement.  

  1. 5.     En quoi la solidarité nationale et internationale face à la microfinance est-elle nécessaire et utile ?

ATTAC Maroc est engagé auprès de ce mouvement depuis 2012. Notre association apporte une contribution modeste à cette lutte importante. Avec les autres membres du réseau CADTM, nous avons décidé de tenir notre deuxième séminaire « dette et femmes » à Ouarzazate en mai dernier. Une caravane internationale tenue tout juste après a permit d’écouter et de recueillir les témoignages des femmes victimes du micro-crédit et d’apporter un soutien moral à ce mouvement.  

Aujourd’hui, ce mouvement arrive à un tournant. Nous avons beaucoup de craintes que la Cour  de cassation au Maroc confirme le verdict en Appel et condamne les deux coordinateurs de ce mouvement et par la même occasion étouffe cette protestation contre le système des micro-crédits.

Nous appelons tous les militant-e-s et organisations à multiplier les actions de solidarité avec les victimes pour qu’elles continuent à dire NON au remboursement de ces emprunts qui ont toutes les caractéristiques de dettes illégitimes.       


[1] Intervention lors de la plénière de clôture : « Pourquoi et comment désobéir aux créanciers ? » des Rencontres d’été du CADTM, le 14 septembre 2014  

زر الذهاب إلى الأعلى