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Déclaration finale du Séminaire « Femmes, dettes et microcrédit » tenu à Bamako du 15 au 19 novembre 2017

Durant 5 journées, du 15 au 19 novembre 2017, une cinquantaine de militantes venues  de 13 pays membres du CADTM Afrique (Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée Conakry, Mali, Maroc, Niger, République Démocratique du Congo, République du Congo, Sénégal, Togo et aussi Argentine ) , se sont retrouvées à Bamako (Mali), pour participer à un 3ème séminaire africain sur le thème « femmes, dette et microcrédit ». La première session s’étant tenue à Cotonou (Bénin) en 2011 et la 2ème à Ouarzazate (Maroc) en 2014.  Ce séminaire a été l’occasion de dresser un état des lieux de la situation de la microfinance dans les 13 pays représentés, de faire le lien entre la question de la dette publique et celle de la dette privée, dont le microcrédit fait partie. Il a permis de comprendre comment le système de la dette, sous toutes ses facettes, est un outil de domination des pays et des peuples et de drainage des richesses au profit de la finance et des multinationales.

Cela donc été un moment d’échange d’expérience, de formation et de travail sur les alternatives et les luttes que les femmes peuvent mener spécifiquement contre ce système de la dette.

Il a non seulement permis de renforcer les aptitudes des femmes à produire des analyses sur la dette, l’audit et le microcrédit, mais aussi de renforcer les liens entre les différentes femmes du réseau africain du CADTM qui ont défini les pistes d’un travail commun pour les prochaines années.

Voici la déclaration qui a été adoptée à la fin des travaux du séminaire :

Déclaration finale du Séminaire « Femmes, dettes et microcrédit »

tenu à Bamako du 15 au 19 novembre 2017

 

Nous, femmes du réseau CADTM Afrique, venues du Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée Conakry, Mali, Maroc, Niger, République démocratique du Congo, République du Congo, Sénégal, Togo, ainsi que d’Argentine, nous sommes réunies pour la 3ème session de notre séminaire « Femmes, dettes et microcrédit » à Bamako au Mali, du 15 au 19 novembre 2017.

En effet, depuis les années 1980, les institutions de microcrédit ont proliféré sur notre continent africain, ciblant tout particulièrement les femmes.

Alors que la crise mondiale du système capitaliste, économique, financière, sociale, énergétique, écologique et de civilisation, aggrave la misère et la précarité, le désengagement de l’État en matière d’action sociale (santé, éducation, eau, électricité, emploi, logement…) affecte l’ensemble des populations paupérisées et en particulier de façon violente les femmes.

Les Accords de partenariat économique (APE, ALE), l’endettement toujours grandissant, imposés à nos pays, plongent les populations dans le cercle infâme de l’austérité, du chômage, de la misère. Les paysan.ne.s se voient chassé.e.s de leurs terres par l’agrobusiness et les multinationales. Le pillage de nos ressources naturelles (forêts, minerais, hydrocarbures, eau, sols…) dévaste les paysages, désertifie et pollue nos territoires, y rendant la vie impossible. Mais parallèlement, alors que les marchandises et les capitaux bénéficient d’une quasi-totale liberté de circulation, les travailleurs et les populations civiles prises en otage par les guerres et les conflits provoqués par les multinationales, se voient empêchés de rechercher la paix ou du travail dans d’autres pays que les leurs. Notre monde se hérisse de murs.

Les maigres acquis que nous avions obtenu après les « indépendances » sont remis en cause par les politiques d’austérité justifiées par la dette : compression de la fonction publique et des budgets publics, privatisation et libéralisation des services publics, compression des salaires, licenciements et chômage structurel.

C’est dans ce contexte que le système du microcrédit vient nous promettre de nous délivrer de la pauvreté et d’émanciper les femmes. En réalité, c’est le contraire qui se passe : nous nous retrouvons dans une spirale de surendettement, à mettre sur pied des microprojets non viables, qui au lieu de nous sortir la tête de l’eau nous enfonce davantage dans la pauvreté, le stress, l’humiliation, la violence. Nous sommes épuisées, nos familles et nos solidarités se disloquent, notre avenir est pris en otage.

Face à cette situation, nous ne voulons pas désespérer. D’autres solutions sont envisageables : subventions, prêts à taux zéro non clientélistes, tontines, projets coopératifs et autogérés, etc. Nous nous battons pour qu’elles existent.

Nous exigeons parallèlement l’audit des institutions de microcrédit comme celui de la dette publique en vue de l’annulation des dettes illégitimes.

Nous exigeons que toutes les femmes –et les hommes- victimes du microcrédit reçoivent des réparations pour les préjudices subis.

Nous appelons à la reconstruction de services publics gratuits de qualité et à l’augmentation des budgets d’action sociale.

Regroupons-nous pour lutter contre le système de la dette publique et privée, contre les accords de libre-échange qui exploitent, humilient les femmes et les hommes ; pillent, détruisent la nature ; poussent les populations sur les routes de la migration et jettent des familles entières dans les rues, les contraignant à la mendicité, à la prostitution et au suicide.

Renforçons nos solidarités avec les populations affectées par le microcrédit, les politiques des Institutions financières et toutes les sangsues qui pompent nos richesses et nos énergies.

Tant que les femmes seront affectées par le système de la dette, de la finance et du microcrédit, nous continuerons la lutte.

An ka ta Kelègni be kè

Naniou Wéyaal Xeex BI

Fanghé NTA Niéméné

La lucha sigue

Kunuana ké na kutatama

النضال مستمر

Esae ndum ya ke osu

Ô wé sou iman em

Wriwri lé yi édji

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